Prémices au surréalisme - 1917 > 1920
Écrits pendant et à la sortie de la guerre, ces 4 poèmes montrent les tentatives d'Hippolyte à chercher d'autres voies, à explorer des formes.
Nous pensons que le l'avant-dernier (des parts) est une sorte de "moquerie", destinée à tourner en dérision le courant surréaliste - qu'il jugeait trop intellectuel et coupé de la réalité.
Le dernier Sydégo, est le poème de la rupture avec le mouvement surréaliste. Il date de 1920 et sera le dernier avant la période qui marquera son retour à la terre. A noter qu'il est construit en référence aux haïkus - célèbres poèmes japonais initiés au 19è siècle qui commencent à se faire connaître en France à cette période.
(Sans titre - fin 1917 ou 1918)
Homme Libre
Affranchi de tes chaînes
Cours dissoudre le mensonge
Qui coagule tes pensées
Dans l’acide de l’oppression
Qu’explose la camisole
Aux charnières de guerre
Homme libre
Electron libre
Un sang magnétique
Purifie l’esclave
Délivre une trajectoire
Aux mille énergies
Dans un mouvement aléatoire
Où se télescopent les synergies
(Sans titre - 1918)
Abstraction de l’être
Re-naissance au travers des lettres
Courir mais à rebours
Chercher l’origine de l’amour
Dans un brouillard sanguinaire
Entrevoir la mère archaïque
Donnant le sein
A des monstres marins
*
Blasphème d’un torrent turbulent
Où est donc le dernier cornac
Perdu dans une ville cigare
Qui part en fumée
*
Chuchotis de turbans
Aveuglant les méduses
Mais pour quel mystère
Se sont-elles suicidées
*
Marché de dupes
Au pays des chapeaux-clac
La sittelle torchepot
A claqué la porte
Pour une contre-façon
*
Je prierai pour toi mangouste
Quand le froid t’emportera
Ton sinueux chemin de croix
A labouré la nef de luxe
Violée par les marchands
Aux couteaux abîmés de sang
Je prierai pour ton acharnement
A dérouler tes secrets de sucre
(Sans titre - 1918)
Pierre grise
Tu fais grise-mine
Car séquoia aime le boisé.
Pierre grise-mine
Je te fais la bise
Pour t'apprendre l'histoire à rise
Séquoia boisé
C'est normal que tu fasses un ré
Sur ta vie chantée
Séquoia boisé
Tu es planté
Avec un C.
Tombe historique
Je te fais le cap
Sur le minerai chaotique.
Tombe historique
Je te laisse sur la crique
Hivernique.
(Sans titre - 1919)
Et la réalité se voile
D’un paravent d’apparat
Où suintent les fissures
D’une frondaison frustrée
Crachant un sang de nacre
Aux lignes absentes
L’évidence s’abstient
De toute rhétorique
Sur les livres abscons
Quand le voile sibyllin
Trahit la substance
Alors je pose mes griffes
Sur le réalisme de schiste
Lacérer mes certitudes
(Des parts – 1920 ?)
Foi
Roi
Pois
Puits
Nuit
Suie
Sârs
Phare
Part
(Sydégo - 1920)
Symphonie d'un œil qui regarde le ciel
Des océans se répandent sous moi
Goéland sera mon nom.
(Sans titre - 1920)
Lambeaux de mots
feuilletés de peaux
gourmandises arrachés
littératures remâchées,
Suspension flottante
île parmi les îles
le mot qui, seul, tente
est un talon d'Achille
Quant aux autres, mots,
ils tombent.
Sous le sens
De l'eau
qui bout,
De bout
en bout.
(Sans titre - 1920)
De long en lignes, je m'endors et à travers
D'un songe à l'autre je pars monts tout se vaut
Cacophonie de dictons qui s'encombrent de vers
dans le reflet du pourtant, d'oniriques bientôt
(Ruban - 1926)
Dérouler la nature d'une espièglerie sinueuse
et sentir la couleur corse des écorces.
Pimenter ce fil décousu de blanc,
de pelures d'oranges et de tapis vert.